Les coulisses de « Madame est bonne ! » dévoilées dans un documentaire de 15 minutes
Du cinéma en milieu rural
Les nombreuses prises de vues aériennes, réalisées avec un drone, plantent le décor. Nous ne sommes pas à Hollywood, mais à Morteau, petite ville de Franche-Comté, où la saucisse et l’horlogerie ont davantage pignon sur rue que le cinéma. « On a voulu essayer de voir comment on pouvait faire du cinéma en milieu rural, avec tout un territoire », explique Kevin Desmidts, natif de la région et producteur du film (22 ans lors du tournage).
Le documentaire met en lumière la dimension participative de ce tournage, bien au-delà du simple financement (pour rappel, « Madame est bonne ! » avait réalisé, en 2015, le plus important financement participatif jamais obtenu pour un court-métrage). Matériaux, nourriture, hébergement, véhicules : des dizaines d’habitants et de commerçants de la région défilent à l’image, apportant chacun leur pierre à l’édifice. « C’est peut-être ça, l’aventure culturelle du troisième millénaire », résume Éric Daviatte, journaliste à l’Est Républicain.
La commune de Morteau a également contribué très directement à la mise en place d’une telle aventure. « Je considère que dans une ville, la culture est un élément essentiel », déclare Annie Genevard, maire et député du Doubs. Grâce au soutien municipal, l’équipe du film a, notamment, eu la possibilité de poser ses valises dans une pépinière d’entreprises, pour la transformer en studio de cinéma éphémère.
Un décor construit pour un court-métrage
Au-delà des questions purement logistiques, la solidarité locale a surtout permis à Vincent Vitte, Adrien Rogé et Kevin Desmidts de faire un pari particulièrement audacieux pour un court-métrage : celui de s’affranchir complètement de lieux existants, pour construire de toutes pièces le décor dans lequel « Madame est bonne ! »se joue. Si de nombreux films sont réalisés en studio, le coût de construction d’un décor n’est généralement pas à la portée d’un court-métrage autoproduit.
« Construire un décor, ça veut dire adapter le décor au film plutôt que le film au décor. C’est une toute autre démarche qui se fait », estime Vincent Vitte. Avec l’aide des artisans et des bricoleurs locaux, le jeune scénariste / réalisateur et son équipe « décoration » (Margot Caperan, Marie Vandeville, Marion Cachon et Charlotte Martin-Favier) ont assemblé de leurs mains, deux semaines durant, un appartement Haussmannien d’environ 100 mètres carrés. Les matériaux ? Des bouts de bois, du placoplâtre déclassé, du medium, en fonction de ce que les entreprises locales livraient au fur et à mesure devant leur « studio ».
Une fois les derniers détails et le mobilier (prêté par un antiquaire local, lui aussi) mis en place, c’est dans un décor plus vrai que nature que l'on voit les jeunes réalisateurs faire leurs premières armes.
Expérience collective
La suite du reportage permet au spectateur de voir de nombreuses images de l’envers du décor, avec les réalisateurs, techniciens et comédiens à l’œuvre. Pour Solange Milhaud, comédienne expérimentée, « c’était très précis, il y avait une exigence qui était très agréable ». Léo Paget, premier assistant, préfère quant à lui évoquer l’ambiance : « on avait presque tous le même âge, des gens passionnés qui aiment ce qu’ils font. L’ambiance était extra ».
Une ambiance collégiale que l’on retrouve d’ailleurs dans les nombreux moments de vie commune qui ponctuent « Derrière Madame », et qui montrent à quel point un tournage comme celui-ci est une expérience collective. Entre deux journées de tournage, on voit l’équipe embarquer sur un bateau pour une escapade au Saut-du-Doubs, lieu touristique incontournable de la région. « C’était vraiment une famille, on a tout partagé ensemble », se remémore Kevin Desmidts.
Un livre pour financer la suite
Avant ce reportage, les coulisses du film avaient déjà été mises à l’honneur dans un livre de 108 pages intitulé « De l’autre côté de l’écran ». Écrit par Kevin Desmidts et illustré par de nombreuses photos signées Adrien Rogé (qui est également derrière la caméra pour « Derrière Madame »), ce livre en papier glacé retrace, lui aussi, la construction de ce projet depuis la rencontre des jeunes cinéastes, alors amis d’enfance au lycée de Morteau.
Un an après sa sortie, le livre « De l’autre côté de l’écran » est toujours disponible à la vente. L’intégralité des bénéfices est destinée à financer les futurs projets de l'équipe.